II Le labyrinthe antique, le labyrinthe chrétien

Publié le par hendrics

II Labyrinthe antique, labyrinthe chrétien

Le labyrinthe est l’archétype d’une épreuve initiatique ouvrant sur la connaissance de soi, la victoire sur soi, la révélation fusionnelle de la part divine en soi. Mais cette démarche est erratique, risquée, et peut donner lieu à de nombreux ratés.

 

Le labyrinthe de Cnossos

Egée, roi d’Athènes n’a pas eu d’enfant avec ses diverses épouses et souhaite avoir un fils. Il va consulter l’oracle de Delphes, puis la magicienne Médée, laquelle promet de lui trouver une femme. Sous l’enchantement Ethra, fille du roi de Trézène, s’éprend d’Egée ; puis aussitôt elle va se réfugier dans l’île de Sphaéra où elle s’unit au dieu Poséidon. Doublement honorée dans la même nuit, elle donnera naissance à un fils, Thésée.

Surdoué, précoce, vigoureux, Thésée a pour lui en plus la séduction, la ruse et le courage. Il est dévoré par l’ambition de devenir roi et met toute son énergie au service de cette ambition.

Pour assouvir cette ambition il va perdre son âme.

Le minotaure, monstre dévoreur et gardien de la porte, est un autre lui-même. En affrontant seul les épreuves du labyrinthe, en se confrontant à son monstre-jumeau, Thésée aurait pu accéder à un niveau supérieur de la connaissance de soi. En ayant recours à la violence et à la ruse, il ressort par la même porte par laquelle il est entré. Il n’y a pas de progrès spirituel. Son retour par la mer aurait pu devenir un chemin vers son père divin, dieu de la mer, vers la lumière que l’on puise dans l’obscurité des profondeurs.

En abandonnant Ariane endormie sur les rives de Naxos, il éloigne le risque d’une nouvelle guerre avec Minos. En s’approchant d’Athènes, il ne pense qu’à précipiter son père terrestre dans la tombe, afin d’occuper le trône au plus vite.

Son ambition est assouvie, il a gagné le pouvoir, il va pouvoir désormais agir sur son environnement avec intelligence et courage. Mais sa victoire sur lui-même est manquée.

 

Dédale et son fils Icare, enfermés dans le labyrinthe par Minos pour se venger de la mort du minotaure élaboreront un autre moyen pour s’en sortir. Dédale a l’idée de fabriquer des ailes semblables à celles des oiseaux, confectionnées avec de la cire et des plumes. Dédale met en garde son fils, lui interdisant de s’approcher trop près du soleil. Mais Icare, grisé par le vol,  ne tient pas compte de l’interdit. En s’élevant de plus en plus haut, il fait fondre progressivement la cire. Il meurt précipité dans la mer.

 

Le mythe d’Icare reprend en miroir le mythe de Thésée. Lui aussi est dévoré par un minotaure intérieur : l’ambition du Savoir.

De même que Thésée a écarté de son chemin son père Egée, de même Icare écartera de son chemin son père Dédale, refusant de tenir compte de ses conseils.

La progression vers le Savoir comporte des garde-fous éthiques, ainsi que la nécessité d’une prise de conscience de nos limitations humaines. Science sans conscience n’est que ruine de l’âme.  Dans son ambition d’approcher au plus près le Savoir absolu, Icare, tel Lucifer, perdra son âme.

 

Le mythe grec illustre un aspect fondamental de la condition humaine : l’homme à la conquête de son environnement :

-         conquête politique pour Thésée : vaincre le mal-être par l’intelligence du pouvoir

-         conquête scientifique pour Dédale et Icare : vaincre les contraintes vitales par le progrès scientifique.

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L’approche chrétienne sera toute autre.

Le mythe de Thésée triomphant du minotaure (esprit du mal) peut être ainsi considéré comme ayant dans notre inconscient collectif, une parenté spirituelle avec celui de Saint Georges

 

Saint Georges personnifie l’idéal chevaleresque : il est dans toute la chrétienté le patron des chevaliers. Officier de l’armée romaine, il traversa un jour une ville terrorisée par un dragon qui exigeait des habitants tous les jours un tribut de deux jeunes gens tirés au sort. Saint Georges arriva le jour où le sort était tombé sur la fille du roi. Georges engagea le combat avec le monstre et, avec l’aide du Christ, finit par triompher. Selon la Légende dorée, le dragon, seulement blessé, le suivra désormais comme un chien fidèle.

Le combat de Georges contre le dragon a donné lieu à une iconographie importante. Georges, assis sur un cheval blanc, tient une lance ornée d’une bannière blanche à croix rouge : bannière qui deviendra celle des Croisés. Au second plan la princesse prie. La scène se passe dans un espace ouvert, devant les murs d’une ville, parfois au bord de la mer.

 

Le labyrinthe de Thésée est un espace clos, une prison d’où nulle évasion n’est possible : les victimes sont condamnées à être dévorées.  On est dans l’ordre de la Fatalité à laquelle nul n’échappe. Le mythe de Thésée, c’est la force de l’Esprit qui avec détermination, vaillance, ruse et ingéniosité peut gagner sur la Fatalité.

Le cheval, faisant corps avec son cavalier, est l’antithèse du labyrinthe : c’est la Liberté. Dès le mythe antique les chevaux divins sont les fils des vents. 

 

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N
Feu de Dieu !<br /> Vous seriez pas anthropologue par hasard ?<br /> Enfin qu'importe.
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