Labyrinthe d'église et stratégies ecclésiastiques

Publié le par hendrics

V Labyrinthe et stratégie ecclésiastique

Tout croyant doit faire face un jour à ce paradoxe : Comment un Dieu d’amour et d’infinie bonté a-t-il pu créer un monde aussi cruel et mauvais ?

Pour les non-croyants, ce paradoxe constitue une preuve patente de la non-existence de Dieu.

Les Cathares quant à eux croient à un dualisme entre deux principes : le Bien et le Mal, et entre deux Créations :

-          d’une part le monde des réalités spirituelles, invisibles et éternelles. C’est la création de Dieu dont les âmes sont les émanations, tels les rayons émanant du soleil

-          d’autre part le monde visible, monde des réalités matérielles vouées à la corruption et à la mort ; c’est le monde du Néant, créé par l’Esprit du Mal

La religion cathare avait pris pour fondement la parole de Saint Paul « Sans l’amour je ne suis rien », c’est-à-dire je ne suis que Néant.

 

Pour éradiquer l’hérésie, et en particulier l’hérésie Cathare, l’Eglise catholique fera appel à quatre stratégies :

 

-          1) le bûcher. Dès le début de son pontificat, le pape Innocent III s’inquiète de l’influence grandissante de l’Eglise Cathare. La volonté d’éradication de l’Eglise Cathare aura suscité la création de l’ordre des Dominicains, frères prêcheurs missionnés pour convertir les Cathares, et ensuite de l’Inquisition, tribunal destiné en priorité à  traquer et questionner tous les Cathares.

L’Inquisition mettait ces derniers devant un choix : l’apostasie ou le bûcher. Nombre de femmes et d’hommes cathares choisirent le bûcher plutôt que d’abjurer leur foi.

Le bûcher se révélera comme une arme à double tranchant. Par delà les cris hostiles de la foule, chauffée à blanc par des fanatiques religieux, nombre d’âmes pures furent troublées par la joie silencieuse des condamnés, jubilant d’être prochainement unis au Christ. Sanguis martyrum, semen christianorum Conçu comme arme de dissuasion anti-cathare, le cérémonial du bûcher pouvait se transformer en appel missionnaire pro-Cathare.

 

-     2)  la Quête du Graal. Jamais le cycle arthurien ne connut autant de succès qu’aux pires moments de la persécution cathare. On est là en présence de ce que les psychanalystes appellent un mécanisme de déplacement : l’affect associé à une représentation mentale dangereuse se détache de celle-ci pour s’investir sur une autre représentation moins dangereuse afin de se défouler. La recherche de la bonne voie menant à Dieu, plutôt que d’être vécue dans l’angoisse du réel, sera théâtralisée, vécue par procuration dans une fiction romanesque

 

-          3) le Tiers-Ordre. En 1210, à la veille de recevoir François d’Assise, le pape Innocent III fit un rêve étrange et prophétique : il vit François soutenant la basilique Saint-Jean de Latran en ruines.

Dans la galerie supérieure de la cathédrale de Strasbourg, on voit un loup tenant un cierge, un porc chargé de reliques, et d’autres quadrupèdes précédés d’un ours tenant une croix, tandis qu’un âne à l’autel dit la messe. Ils symbolisent l’ignorance, la cupidité et la lubricité du clergé de l’époque.

C’est sans doute cette réalité qu’évoque l’église en ruines contemplée en rêve par le pape.

En 1222, à la demande des laïcs, François d’Assise créa le Tiers-Ordre. Cette fraternité laïque propose aux hommes de foi un mode de vie apostolique, basé sur une pauvreté volontaire, laborieuse et pieuse, qu’ils ne trouvaient auparavant de manière organisée que dans le catharisme. On peut considérer que l’esprit de cet Ordre devint l’arme principale du retour à l’Eglise catholique.

 

-          4) Les Labyrinthes d’Eglise. Lorsque le démon de l’hérésie rôde, il importe de mettre le troupeau à l’abri dans le bercail. Cette préoccupation contribua largement à la création des labyrinthes d’Eglise. Le pèlerinage de Jérusalem allait désormais pouvoir se réaliser en esprit, symboliquement, loin des dangers physiques et surtout spirituels du pèlerinage réel. Dans le labyrinthe d’église, tout est sous contrôle : le chemin qui mène au centre du labyrinthe appelé Jérusalem est pénible, mais il est unique, dûment ciblé, sans impasses ni fausses sorties ; l’errance est soigneusement canalisée. Le labyrinthe d’église sera le garde-fou protégeant de l’hérésie.

 

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Blog(fermaton.over-blog.com),No-22. - THÉORÈME OMÉGA.- La Science des Sciences.
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